Sciences de la vie et de la terre

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Utiliser un logiciel de modélisation pour comprendre la sélection naturelle et la dérive génétique

Objectif

  • Permettre de manipuler un modèle pour comprendre les concepts de dérive génétique et sélection naturelle.
  • Faire comprendre qu'il est indispensable de comparer la théorie explorée en utilisant un modèle et des données réelles issues d'expériences ou d'observations de terrain.
  • Aborder un modèle classique de sélection naturelle avec le mélanisme industriel chez la phalène du bouleau (sélection d'origine anthropique).

Les outils

Le logiciel Edu'modèle permet de simuler l'évolution d'une population dans un univers en 2 dimensions.

Un modèle très simple a été créé. Il se base sur les hypothèses suivantes :

  • Les papillons se déplacent de façon aléatoire.
  • Deux phalènes qui se rencontrent ont 10% de chances de s’accoupler
  • Après reproduction, les deux parents meurent et on obtient 4 descendants dont les génotypes sont déterminés par ceux des parents (tableau de croisement).
  • Une phalène du bouleau vit en moyenne 100 unités de temps (soit 10 jours). 
  • Une phalène du bouleau devient apte à se reproduire après 10 unités de temps (1 journée) ce qui lui laisse le temps de se disséminer.

Les limites du modèle

  • Pas de stade œuf, chenille, chrysalide
  • Pas de différence entre mâle et femelle : 1 phalène peut se reproduire avec n'importe quelle autre
  • Les hasards de la méiose et de la fécondation sont ignorés
  • Le nombre de descendant n'est pas réaliste (une femelle peut pondre jusqu'à 2000 œufs)

 

Il est bien sûr très intéressant de faire construire aux élèves un modèle de ce type.

En seconde (Programme de 2019+)

Connaissances : La dérive génétique est une modification aléatoire de la fréquence des allèles au sein d'une population au cours des générations successives. Elle se produit de façon plus rapide lorsque l’effectif de la population est faible.

La sélection naturelle résulte de la pression du milieu et des interactions entre les organismes. Elle conduit au fait que certains individus auront une descendance plus nombreuse que d’autres dans certaines conditions.

 

Objectifs : on illustre la dérive génétique et la sélection sur une échelle de temps court afin de montrer que l’évolution peut être rapide.

 

Capacités :

  • Utiliser un logiciel de modélisation et/ou extraire et mettre en relation des informations pour illustrer la sélection naturelle et la dérive génétique sur des temps courts
  • Expliciter la démarche sur laquelle repose une théorie scientifique à partir du travail mené sur l’évolution dans ce thème

Rappel sur l'exemple étudié

La phalène du bouleau est un papillon de nuit qui pond sur le bouleau. La couleur de ses ailes est gouvernée par un seul gène. L'exemple est donc simple à étudier :

    • Une forme sombre (carbonaria) codée par l'allèle C
    • Une forme claire (typica) codée par l'allèle T.
    • C est dominant sur T.
Forme typicaForme carbonaria

Photos : Chiswick Chap

License : Creative Common Attribution, Partage dans les mêmes conditions, modifiable

Dans la deuxième moitié du XIXème siècle, la forme carbonaria se répand dans les régions industrialisées de la Grande-Bretagne.

A noter qu'il existe également un allèle I, très minoritaire, qui code pour une couleur grise intermédiaire. Cet allèle est codominant avec T (donnant une couleur gris claire) et récessif par rapport à C.

Des études récentes montrent que l'allèle C est apparu au début du XIXème siècle suite à l'insertion d'un élément transposable répété en tandem dans le premier intron du gène Cortex. Cette insertion entraine une suractivation du gène, en particulier dans les disques imaginaux à l'origine des ailes. Le contrôle exact et le lien avec la mélanisation des ailes est encore obscur.

Proposition de scénario pédagogique

Le document d'appel pourra, tout simplement, être une adaptation de la carte de répartition des phénotypes de la phalène du bouleau en 1850 telle que proposée par Kettlewell dans son article sur la répartition des phalènes du bouleau (1958).

Carte : Y. Thomas d'après les données de Kettlewell (1958)

 

Le problème émerge alors tout naturellement : "Comment expliquer la répartition des couleurs de phalène du bouleau ?"

L'hypothèse d'une influence de l'industrialisation dans la fréquence élevée des phalènes du bouleau noire est alors généralement posée.

 

Dans les régions industrielles, les branches et les troncs des bouleaux sont noirs en raison de la pollution qui détruit les lichens qui leur donnaient une couleur blanche.

Des photos de phalène du bouleau posée sur des troncs de bouleau peuvent être proposée pour affiner la réflexion : les phalènes claires sont mieux camouflés sur les troncs blancs, à l'inverse les phalènes sombres sont peu visibles sur les troncs noirs, ceci laisse supposer une différence de survie face aux prédateurs.



Le modèle va permettre de tester l'hypothèse qu'une différence de survie peut aboutir à la répartition observée.

Le peuplement du modèle à t=0 : en noir les (C//C) en rouge les (C//T) et en gris les (T//T)

 

Pour cela :

  1. On peut faire tourner le modèle, tel quel, à plusieurs reprises pour illustrer la dérive génétique (On obtient au bout de 500 pas de temps des fréquences différentes à chaque itération en raison des hasards de la reproduction). On peut alors faire varier la taille de la population pour constater que la dérive génétique est plus importante dans les petites populations.
  2. On fait modifier aux élèves la survie des phalènes pour simuler un milieu pollué (survie augmentée à 120 pour les phalènes sombres et diminuée à 60 pour les phalènes claires). On constate alors une augmentation rapide de la fréquence des phalènes sombres.
  3. On procède de même pour un milieu non-pollué (survie augmentée à 120 pour les phalènes claires et diminuée à 60 pour les phalènes sombres). On constate alors une augmentation rapide de la fréquence des phalènes claires.

 

Résultats de la simulation à t=400 en environnement pollué
Résultats de la simulation à t=400 en environnement non-pollué



Enfin, un retour à la situation réelle s'impose.

Pour valider les conclusions du modèle (qui est simpliste), on peut se baser sur les expériences de Kettlewell de capture/marquage/recapture montrant un réel différentiel de prédation entre les phalènes blanches et noires.

 


Cela peut être complété par une étude de l'évolution de la fréquence des phalènes au cours du temps lors des campagnes de dépollution commencées dans les années 1950 au Royaume-Uni.

Graphique Vincent Giuli d'après les données de Vant't Hof et al. 2016

Licence : Creative Commons - Attribution - Pas d'utilisation commerciale

 

 

Remarques finales et critique du modèle

On remarque au passage que si les fréquences évoluent bien comme le devraient (augmentation des formes avantagées et diminution des formes désavantagées), on constate néanmoins une forte croissance de toutes les formes. On ne peux ainsi pas aboutir à une disparition des formes défavorables.

Les limites du modèles peuvent être discutées pour expliquer ce phénomène. Entre autre paramètre on peut évoquer : 

  • Une pression de sélection trop faible (= survie des formes défavorables trop longue)
  • L'absence de stade oeuf et larve qui regroupent l'essentiel de la mortalité chez les papillons.
    Même si elle n'est pas différenciée entre les formes étudiées ici.
  • Un nombre de descendants non réaliste et l'absence du hasard de la méiose et de la fécondation (on n'a ici que le hasard de la rencontre des partenaires).